17 octobre 2018
Bail commercial : de l’importance pour le bailleur de définir une stratégie avant de prendre toute initiative.
A propos de l’arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation le 28 juin 2018, n° 17-15.247
Les faits sont simples : une société exploite un fonds de « restauration, salle de réunion, traiteur et organisation de soirées ». Son bailleur s’aperçoit qu’une activité de boite de nuit est exercée dans les locaux.
Dans un premier temps, le bailleur fait délivrer à son preneur un commandement d’avoir à respecter les clauses du bail s’agissant de la destination. Il vise la clause résolutoire, signifiant ainsi sa volonté d’en obtenir la résiliation en cas de poursuite de l’activité de boite de nuit.
Aucune autre initiative ne semble prise pendant deux années, avant que n’arrive l’échéance du bail.
Voyant finalement dans cette situation une opportunité d’obtenir une augmentation de loyer, le bailleur adresse à son preneur un congé avec offre de renouvellement, portant proposition d’un loyer plus élevé.
Puis, cinq mois plus tard, le même bailleur sollicite cette fois la remise en état des lieux suite à la réalisation de travaux interdits dans le bail.
Le preneur conteste ce commandement en justice et le bailleur demande à titre reconventionnel que le juge constate la résiliation du bail au bénéfice de l’acquisition de la clause résolutoire. Les premiers juges lui donnent raison : il est établi que les lieux ne sont pas exploités conformément à la destination du bail et que des travaux non autorisés ont été entrepris.
Non dira la Cour de cassation : en faisant délivrer un congé avec offre de renouvellement puis en reprochant au preneur de nouvelles infractions au bail, le bailleur a tacitement renoncé à se prévaloir de l’acquisition de la clause résolutoire.
Cet arrêt est fondé sur les dispositions de l’article 1134 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance de 2016, qui disposait « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».
L’enseignement à tirer de cet arrêt est clair : prendre une initiative procédurale n’est jamais anodin et doit être le résultat d’une stratégie élaborée en amont, en tenant compte de toutes les opportunités et hypothèses envisageables.