23 avril 2018
La communication entre l’avocat et son client détenu
Dans un arrêt rendu le 12 décembre 2017 (n°17-85757), publié au bulletin, la chambre criminelle de la Cour de cassation consolide l’édifice des droits de la défense.
Une personne mise en examen du chef d’infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive s’était vue confirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire par la chambre de l’instruction.
Lors du débat contradictoire, préalable au placement, deux avocats assistaient le mis en examen, avant que ce dernier n’en désigne un troisième.
Trois mois plus tard, les conseils étaient à nouveau convoqués pour un débat portant sur une éventuelle prolongation du mandat de dépôt et devant se dérouler le mois suivant.
L’avocat dernièrement désigné avait demandé au juge d’instruction en charge du dossier, par deux fois, un permis de communiquer avec son client incarcéré et ce, avant la date prévue pour le débat contradictoire.
A l’issue de l’audience devant le juge des libertés et de la détention, ce dernier décidait de prolonger la mesure de détention provisoire dont le mis en examen faisait l’objet.
Saisi d’un appel de cette ordonnance de prolongation fondé notamment sur l’absence de délivrance du permis de communiquer, la chambre de l’instruction avait estimé qu’aucune atteinte aux droits de la défense n’était caractérisée dans la mesure ou les deux premiers avocats choisis avaient été dûment convoqués, que le premier avocat désigné avait reçu un permis de communiquer et qu’en tout état de cause, le troisième avocat n’aurait pas pu être présent lors du débat contradictoire.
Cet arrêt a été censuré par la Cour de cassation, qui a considéré que « La délivrance d’un permis de communiquer est indispensable à l’exercice des droits de la défense ».
Elle a ensuite ajouté qu’il importe peu que l’avocat ne soit pas le premier choisi, c’est-à-dire celui qui reçoit les convocations et notifications, ni que l’avocat fasse savoir qu’il ne serait pas disponible à la date du débat contradictoire.
L’avocat doit purement et simplement pouvoir avoir accès à son client incarcéré, qu’il soit désigné ou choisi avec d’autres.
Cette décision, rassurante, n’est pour autant pas surprenante.
Il est difficile de penser que la haute juridiction aurait pu rendre une décision contraire tant la communication entre le mis en examen et l’avocat est le préalable nécessaire à tout autre droit de la défense.
Les magistrats n’ont d’ailleurs pas manqué de le relever, en précisant que cette libre communication est « indispensable ».
D’ailleurs, l’article 56-6-5 du code de procédure pénale ne laisse aucune alternative puisqu’il est inscrit que le permis de communiquer « est délivré aux avocats».
En s’appuyant sur l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, les magistrats ont considéré que le libre accès du mis en examen incarcéré à son avocat faisait partie intégrante du droit à un procès équitable.
Si cette décision est, en apparence, satisfaisante, la Cour de cassation a tout de même admis, dans son dispositif, l’exception de la fameuse « circonstance insurmontable », dont les contours ne sont jamais précisément définis, justifiant le non-respect de la règle de droit.
En tout état de cause, il est salutaire de rappeler que le droit de communiquer est un principe fondamental faisant partie intégrante des droits de la défense.
En l’espèce, le défaut de délivrance d’un permis de communiquer à chacun des avocats désignés faisant nécessairement grief à la personne mise en examen, l’intéressé a retrouvé sa liberté et peut désormais librement communiquer avec n’importe lequel de ses conseils…