29 mars 2019
Création d’un guichet de régularisation fiscale pour les entreprises
Après la loi pour un Etat au service d’une société de confiance et la loi de lutte contre la fraude, le Ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, a annoncé, le 14 mars dernier, dans le cadre d’une réunion de lancement de la « nouvelle relation de confiance entre les entreprises et l’administration fiscale », l’ouverture du guichet de régularisation fiscale à destination des entreprises.
La mise en place de ce service de mise en conformité fiscale des entreprises s’inscrit dans le même esprit que la cellule de régularisation qui avait été mise en place en 2013 pour les particuliers détenant des avoirs à l’étranger non déclarés. Ce service a permis à ces contribuables de régulariser spontanément leur situation fiscale en bénéficiant de taux de pénalités réduits. Ce service, qui a fermé ses portes le 31 décembre 2017, a connu un grand succès.
Le Gouvernement met désormais en place un service de régularisation similaire à destination des entreprises.
Les conditions et modalités pratiques de l’intervention de ce service sont définies par une circulaire datée du 28 janvier 2019 mise en ligne mi-mars sur le site impôts.gouv.fr.
Tout d’abord, la démarche de l’entreprise doit revêtir un caractère spontané. Sont donc exclues du dispositif les entreprises pour lesquelles un contrôle fiscal est en cours, qui ont reçu un avis de vérification ou qui font l’objet d’une procédure d’enquête administrative ou judiciaire.
Le service est ouvert aux problématiques fiscales limitativement énumérées ci-après :
- Toutes les anomalies fiscales découvertes par les nouveaux détenteurs et repreneurs d’une entreprise;
- aux problématiques en matière de fiscalité internationale: une activité en France non déclarée, constitutive d’un établissement stable, déduction de tout ou partie des intérêts d’un prêt consenti par une société étrangère, montages illicites ou abusifs, et de manière générale les montages impliquant des structures à l’étranger ;
- aux problématiques en matière de fiscalité du dirigeant: régime fiscal des impatriés, non-respect des conditions d’un « pacte Dutreil », non assujettissement à tort d’une plus-value de cession de titres ;
- plus généralement toute opération susceptible de relever d’une des sanctions prévues à l’encontre des activités occultes[2] ou des abus de droit et des manœuvres frauduleuses.
Les dossiers de régularisation doivent être déposés auprès du service de régularisation des entreprises au sein de la Direction des Grandes Entreprises de la Direction Générale des Finances Publiques, instituée point d’entrée unique de tous les contribuables de la sphère professionnelle, quelle que soit leur taille. Ce dispositif assure ainsi un traitement centralisé et homogène des demandes.
Le dossier de régularisation fiscale doit comprendre :
- une demande de mise en conformité ;
- un écrit exposant de manière précise et circonstanciée la problématique faisant l’objet de la régularisation, accompagné de tout document probant ;
- les déclarations rectificatives couvrant toute la période non prescrite ;
- les justificatifs relatifs aux montants régularisés et permettant leur calcul pour s’assurer de l’exactitude des données chiffrées ;
- une attestation du contribuable selon laquelle son dossier est sincère.
Le traitement des demandes de régularisation est organisé dans le respect du droit en vigueur, et dans le cadre des règles de prescription prévues par le Livre des Procédures Fiscales lesquelles prévoient notamment un délai de prescription étendu, en présence d’une activité occulte.
Les contribuables doivent s’acquitter du paiement intégral des impositions supplémentaires à leur charge, ou s’engager à l’acquitter selon un échelonnement convenu avec l’administration.
Ces impositions supplémentaires sont calculées en faisant application de l’ensemble des dispositions en vigueur au titre de chacune des années concernées et dans la limite de la prescription fiscale à la date de dépôt du dossier.
Le caractère spontané de la démarche est pris en compte en modulant, par voie transactionnelle, le taux de la majoration ainsi que le taux de l’intérêt de retard :
Taux de droit commun[3] | Taux en cas de mise en conformité | Intérêts de retard |
80 % (manœuvres frauduleuses ou abus de droit) | 30 % | réduits à 40 % |
40 % (manquement délibéré) | 15 % | réduits à 40 % |
10 % (défaut de déclaration) | 0 % | réduits à 50 % |
A noter que des modalités particulières concernant la réduction des intérêts de retard sont prévues en cas de demande de mise en conformité par les nouveaux détenteurs et repreneurs d’une entreprise intervenant dans un délai de 18 mois après la reprise de l’entreprise, en fonction de l’existence ou non d’une garantie de passif accordé par le cédant.
Une fois que le contribuable a signé et renvoyé la transaction au service de mise en conformité fiscale des entreprises, le service comptable compétent lui adresse un avis de mise en recouvrement de ces impositions et, le cas échéant, de ces pénalités, telles qu’elles ont été fixées dans la proposition de transaction signée.
A réception de cet avis de mise en recouvrement, le contribuable doit régler l’intégralité des sommes dues dans le délai ou selon le calendrier fixé en accord avec l’administration.
En cas de désaccord avec l’entreprise sur les conditions de mise en conformité, la DGFIP peut engager un contrôle fiscal.
Enfin, il est précisé que, conformément aux règles de droit commun, la transaction peut être remise en cause et déclarée caduque s’il s’avère ultérieurement que les déclarations rectificatives et le dossier déposé ne sont pas sincères.
Cette nouvelle cellule de dégrisement présente un caractère sécurisant pour les entreprises qui rencontrent au cours de leur vie sociale des anomalies fiscales « régularisables » dans les conditions de la circulaire. Toutefois, on peut regretter que ce guichet de régularisation n’ait pas un champ d’intervention plus large pour être réellement efficace.
[2] Article 1728 c) du Code Général des Impôts (CGI) et article 1729 b et c du CGI
[3] Taux qui aurait été appliqué si le manquement avait été découvert à l’occasion d’un contrôle fiscal