7 mars 2019
Employeurs : attention à la double peine en cas de non dénonciation des infractions routières !
Dans deux arrêts du 11 décembre 2018 (n°18-82628 FS-PB et 18-82820 FS-PB), la Chambre criminelle de la Cour de cassation apporte des précisions inédites quant aux conséquences de la non dénonciation par l’employeur des infractions routières commises par un salarié avec un véhicule de société.
Pour mémoire, la loi 2016-1547 du 18 novembre 2016 prévoit, depuis le 1er janvier 2017, que lorsqu’une infraction constatée par un appareil de contrôle automatique est commise avec un véhicule appartenant ou loué par une personne morale, le représentant légal de cette dernière doit déclarer l’identité et l’adresse du conducteur au volant au moment de la commission de l’infraction (article L. 121-6 du code de la route).
Il dispose de 45 jours à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, pour communiquer ces informations à l’autorité mentionnée sur cet avis, sauf s’il établit l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou d’un événement de force majeure. Le fait de contrevenir à cette obligation est puni de l’amende prévue pour les contraventions de 4ème classe.
Restait un doute quant à la personne pénalement responsable de l’infraction de non désignation du conducteur : était-ce l’employeur en tant que personne physique ou l’entreprise en tant que personne morale ?
L’enjeu n’est pas neutre : le montant de l’amende en question s’élève à 750 euros en cas d’engagement de la responsabilité du représentant légal et… à 3.750 euros en cas de mise en cause de la responsabilité de la personne morale.
Le texte de l’article suscité ne fait mention que du représentant légal de l’entreprise devant révéler l’identité du conducteur et susceptible, en conséquence, d’être poursuivi en cas de non-respect de cette obligation légale. Parallèlement, les avis de contravention étaient en réalité bien souvent adressés à la société, personne morale, et non à son représentant légal.
La Cour de cassation met un terme définitif à ces interrogations dans les arrêts rendus le 11 décembre 2018.
Dans ces deux affaires, les employeurs n’avaient pas transmis l’identité des conducteurs salariés ayant commis l’infraction. Un avis de contravention avait alors été adressé à la société personne morale et non à son représentant légal, et avait ainsi fait l’objet d’une contestation.
La haute juridiction a considéré que la responsabilité pénale de la société peut être engagée pour cette infraction commise, pour son compte, par son représentant.
Elle indique, dans le même temps, que les poursuites à l’encontre du dirigeant personne physique ne sont pas pour autant écartées, même si l’avis de contravention est adressé à la personne morale.
La sanction en cas de non dénonciation par l’employeur de l’auteur d’une infraction routière peut donc s’en trouver considérablement alourdie.
Les employeurs devront donc se montrer particulièrement vigilants en la matière, d’autant que la Cour vient de préciser dans un arrêt du 15 janvier 2019 (n° 18-82.380 FS-PB) que l’obligation de désigner le conducteur auteur de l’infraction s’applique y compris lorsque le conducteur auteur de l’infraction est le représentant légal de la société.
En d’autres termes, le fait que la contravention initiale ait été payée par le représentant légal qui, de fait, s’est auto-désigné comme auteur acceptant la perte de points correspondant ne suffit pas. Il doit également veiller à accomplir les formalités de désignation du conducteur prévues par le code du travail.
La haute juridiction a par ailleurs précisé dans l’un de ses arrêts de décembre 2018 (n°18-82820) que l’infraction pour non désignation du conducteur est constituée dès lors que l’avis de contravention a été envoyé après le 1er janvier 2017, peu important à cet égard la date de l’infraction.