6 juillet 2018
Indemnité d’occupation : indemnité réparatrice non soumis à la TVA ?
Par un arrêt remarqué du 30 mai 2018, le conseil d’État vient préciser que l’indemnité d’occupation accordée au bailleur en raison de l’occupation de son local sans droit ni titre est une indemnité réparatrice qui, de ce fait, ne doit pas être soumis au régime de la TVA.
En l’espèce, le preneur d’un bail commercial avait résilié sa convention mais s’était maintenu dans les lieux postérieurement à la date de prise d’effet du congé.
Le propriétaire des murs avait introduit une action aux fins d’expulsion devant le juge judiciaire qui avait accordé des délais au preneur et, par la même, avait fixé le montant d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer versé à l’occasion du bail expiré.
Le bailleur avait considéré que cette indemnité avait vocation à réparer le préjudice subi du fait de l’occupation sans droit ni titre de son local et ne l’avait donc pas soumis à la TVA.
L’administration fiscale avait pris la position inverse et considéré que cette indemnité rémunérait une prestation de service à titre onéreux, équivalente à un loyer, et que de ce fait elle devait être soumise à la TVA. Raisonnement validé par les juges du fond.
Le conseil d’État a pour autant annulé l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel et précisé que l’indemnité d’occupation ne constitue pas une rémunération d’une prestation de service à titre onéreux mais répare un préjudice, peu importe que le montant de cette indemnité ait été fixée par le juge sur la base du loyer anciennement acquitté.
Cette solution, fondée sur la nature réparatrice de l’indemnité versée, doit-elle pour autant être limitée aux indemnités fixées par le juge ?
L’article 145-28 du code de commerce prévoit en effet l’hypothèse dans laquelle un locataire se maintient dans les lieux, postérieurement au congé qui lui a été délivré par son bailleur, dans l’attente de la fixation de l’indemnité d’éviction par le juge.
En pareil cas, le locataire ne s’acquitte plus d’un loyer mais d’une indemnité d’occupation.
Doit-on dès lors considérer que cette indemnité est réparatrice d’un préjudice et doit donc suivre le même régime que celui retenu par le conseil d’Etat ?
A priori non.
L’indemnité d’occupation visée à l’ article L. 145-28 du Code de commerce« assure la réparation du préjudice résultant normalement de l’occupation sans droit ni titre du bien concerné » : l’indemnité d’occupation due par le locataire évincé en attendant le versement de son indemnité d’éviction ne compense donc pas une occupation sans droit ni titre puisque cette occupation est précisément fondée sur un texte légal, qui énonce qu’“aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d’éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l’avoir reçue”.
Le locataire commercial débiteur d’une indemnité d’occupation en vertu de l’article L. 145-28 se voit donc doté d’un titre légal d’occupation des lieux.
Ce n’est donc pas un locataire sans droit ni titre. L’indemnité qui en résulte n’a donc aucunement vocation à compenser un préjudice. Il s’agit donc bien de la rémunération d’une prestation de service à titre onéreux suite au choix du bailleur de délivrer un congé avec refus de renouvellement et offre d’une indemnité d’éviction.
Bien mal en prendrait donc aux bailleurs qui considéreraient, à la lecture du récent arrêt du conseil d’Etat, qu’une indemnité d’occupation, quelle qu’elle soit, ne doit pas être assujettie à la TVA.