26 septembre 2019
La caractérisation du délit de blanchiment : la nécessité d’une infraction préalable
Le délit de blanchiment, prévu et réprimé par l’article 324-1 du code pénal, est une infraction de conséquence qui suppose, comme condition préalable, la commission d’une infraction principale ayant permis de générer les profits objets des opérations de blanchiment.
Par un arrêt du 25 juin 2003, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a affirmé que « ce délit [de blanchiment] nécessite que soient relevés précisément les éléments constitutifs d’un crime ou d’un délit ayant procuré à son auteur un profit direct ou indirect » (Crim. 25 juin 2003, n°02-86.182).
A défaut d’une infraction principale, il ne peut y avoir de blanchiment.
Ce principe a trouvé à s’appliquer récemment devant le tribunal correctionnel de Lyon.
Il était reproché à notre client un train de vie hors de proportion avec ses revenus déclarés et dont le financement ne pouvait provenir, selon l’accusation, que de revenus occultes ayant conduit à une minoration de ses déclarations fiscales de revenus entre 2010 et 2012.
Nous avons pu démontrer, au cours des investigations, que notre client avait gagné entre 2008 et 2012 une somme totale de 280.000 € dans différents casinos français, en jouant principalement mais pas exclusivement aux machines à sous et que cette somme couvrait une grande partie du train de vie tel qu’il était reproché par le Ministère Public (achat de véhicules, voyages, financement d’aménagements intérieurs…)
Or, selon une jurisprudence bien établie, la pratique des jeux de hasard ne constitue pas une occupation lucrative ou une source de profits au sens de l’article 92 du code général des impôts en raison de l’aléa qui pèse sur les perspectives de gains du joueur (Conseil d’Etat, 25 avril 1979, n°2306).
C’est encore aujourd’hui la solution consacrée par le Bulletin Officiel des Finances Publiques Impôts (BOFiP) qui, sous le champ BOI-BNC-CHAMP-XXII Jeux de hasard, stipule :
« Sous réserve des solutions exposées au BOI-BNC-CHAMP-10-30-40 [relatives aux joueurs professionnels de bridge ou poker], la pratique même habituelle de jeux de hasard, tels que loteries, tombolas ou jeux divers, ne constitue pas une occupation lucrative ou une source de profits devant donner lieu à imposition au nom des personnes participant à ces jeux ».
Ces gains n’étaient donc pas soumis à l’impôt sur le revenu, ni d’ailleurs à un quelconque autre impôt, étant précisé en outre que les gains aux jeux de casino n’ont aucun caractère occulte puisqu’au-delà de 1.500 € ils font l’objet d’un prélèvement à la source (c’est-à-dire lors du paiement du gain à la caisse du casino) de 13,7 % correspondant à la CSG.
En l’absence de délit principal, il était impossible pour le tribunal d’entrer en voie de condamnation du chef de blanchiment. Ce que les magistrats n’ont pas manqué de relever : « A défaut d’avoir pu établir que les sommes en question étaient le produit du délit de fraude fiscale dont l’existence n’est pas établi, il y a lieu d’entrer en voie de relaxe au profit du prévenu ».
Notre client a été relaxé et cette relaxe est aujourd’hui définitive.
Le Cabinet Jakubowicz, Mallet-Guy & Associés représenté par Maître Alexandre Plantevin se tient à votre disposition pour vous conseiller et vous assister dans toute procédure pénale vous exposant à des poursuites du chef de blanchiment.