Indemnisation du préjudice causé à une SCI par son gérant
Introduction
Nous avons obtenu du Tribunal de commerce de Nanterre l’indemnisation d’une société civile immobilière en exerçant l’action sociale dite « ut singuli » pour le compte de certains associés et notamment du cogérant, la société ayant subi un préjudice du fait de la résiliation par le cogérant d’un bail commercial et de la conclusion d’un nouveau bail commercial à des conditions moins favorables pour la société.
Pour qui ?
Nos clientes, une société à responsabilité limitée (« SARL ») spécialisée dans le commerce de détail d’habillement et sa gérante, sont toutes deux associées d’une société civile immobilière (« SCI ») comprenant trois associés.
Pour quoi ?
Cette SCI est dirigée par deux gérants, une SARL, notre cliente, et une société par actions simplifiées (« SAS »).
La SCI détient un entrepôt industriel situé en région parisienne qu’elle a donné à bail pour une durée ferme de 9 ans à une société dont le gérant n’est autre que le président de la SAS, associée de la SCI.
Nos clientes se sont aperçues que ce bail avait été résilié de manière amiable à l’initiative de la SAS cogérante et qu’un nouveau bail avait été conclu avec une nouvelle société.
Or le montant du loyer annuel ainsi que celui du dépôt de garantie ont sensiblement été réduits.
Le nouveau locataire pouvait par ailleurs résilier le contrat de bail dès la 3ème année, ce qui avait été exclu dans le cadre du précédent bail.
L’objet de ce nouveau bail était en outre plus large que le précédent bail, sans pour autant qu’une indemnité de déspécialisation ait été versée à la SCI.
Au cours d’une assemblée générale ordinaire, nos clientes ont donc contesté la conclusion de ce nouveau bail à des conditions moins avantageuses pour la SCI.
Nos clientes ont également mis en demeure la SAS cogérante de régler à la SCI la différence entre les deux baux.
Leurs démarches étant restées vaines, nos clientes ont exercé l’action dite « ut singuli » et assigné la SAS cogérante devant le Tribunal de commerce de Nanterre pour obtenir la réparation du préjudice subi par la SCI.
Dans le cadre de cette procédure, nos clientes se sont également aperçues que ce deuxième bail avait été résilié et qu’un troisième bail avait été conclu avec une nouvelle société.
Comme ça
La défenderesse a tout d’abord contesté la compétence matérielle du tribunal saisi au profit du tribunal de grande instance en considérant que ce dernier avait compétence exclusive pour statuer en matière de baux commerciaux.
Le Tribunal de commerce de Nanterre a toutefois repris notre argumentation et s’est déclaré compétent : l’action introduite par nos clientes n’était pas fondée sur le statut des baux commerciaux mais sur les fautes commises par le gérant de la SCI et visait à obtenir l’indemnisation des préjudices financiers subis par la société.
Souhaitant par tous moyens échapper aux débats sur le fond du litige, la SAS a formé un contredit devant la Cour d’appel de Versailles mais celle-ci a confirmé le jugement du Tribunal de commerce de Nanterre dans toutes ses dispositions.
Comme nous l’avions soulevé, le tribunal de commerce reste compétent pour connaitre des litiges relatifs aux actions sociales « ut singuli » et déterminer les fautes de gestions commises par le cogérant d’une société nonobstant le fait que ces fautes portent sur des baux commerciaux.
Sur le fond, la défenderesse a prétendu qu’aucune faute de gestion n’avait été commise dans la mesure où elle avait accompli des actes de gestion courante non soumis à la procédure des conventions réglementées.
Pour les mêmes raisons, selon cette dernière, aucune violation des statuts, qui précisaient la nécessité de notifier au cogérant « toute opération impliquant un engagement direct ou indirect supérieur à une limite fixée chaque année par décision collective ordinaire des associés », ne pouvait être invoquée.
La défenderesse a affirmé qu’elle s’était toujours occupée seule de la gestion de la SCI et que la conclusion du précédent bail n’avait fait l’objet d’aucune approbation des associés.
Elle a par ailleurs contesté le préjudice invoqué par nos clientes en considérant que les actes litigieux étaient conformes à l’intérêt de la SCI compte-tenu de la rentabilité de ces baux et des résultats financiers en constante progression de la société.
Le tribunal a repris notre argumentation et considéré que la procédure des conventions réglementées devait s’appliquer à la résiliation fautive du bail initial ainsi qu’au nouveau bail qui avait eu pour effet de diminuer le loyer initial perçu par la société, de sorte que ces conventions auraient dû être soumises aux associés.
Le Tribunal de commerce de Nanterre a donc jugé que la SAS en sa qualité de cogérante avait commis une faute de gestion consistant à ne pas avoir informé nos clientes, et plus particulièrement la SARL cogérante, du départ du premier locataire et de la conclusion d’un nouveau bail moins favorable à la SCI notamment quant au montant du loyer.
Le Tribunal a ainsi indemnisé la SCI du préjudice subi lié à la perte de loyer sur la durée du bail initial restant à courir.
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